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Par Anne-Sophie Gamelin
- Posté le
09
mai
2020
3 questions à Régine Ferrère, Présidente de la CNEP
Comment voyez-vous l’après ?
Régine Ferrère : Après avoir vécu au cœur de cette crise et accompagné des centaines de chefs d’entreprise, j’ai la ferme conviction que chacun a pris la mesure de son ampleur. Certes, il s’agit avant tout de sauver l’entreprise mais pas à n’importe quel prix.
J’ai rencontré des professionnelles parfaitement conscientes des enjeux et surtout, parfaitement réalistes. Reprendre ne signifie pas seulement rouvrir sa porte et son cahier de rendez-vous, acheter un kit avec masques, gel hydro-alcoolique et des gants. C’est bien plus complexe dans la réalité. Il faut avant tout assurer la sécurité des salariés et des clients, et le gouvernement est clair sur le sujet. Il ne souhaite pas atténuer les responsabilités des chefs d’entreprise. Le travail administratif est important, et la réussite du déconfinement passe par la mise en place de protocoles fiables et durables pour tous les postes de l’entreprise. Il faut donc réorganiser en profondeur nos métiers de l’institut, du spa ou des centres d’embellissement du regard et des ongles. Et ceci durablement car ce n’est pas une crise passagère. C’est une autre ère qui s’ouvre devant nous. Il faut réinventer nos méthodes de travail, repenser nos protocoles, et c’est le défi de toute une filière, pas simplement de l’esthéticienne dans son entreprise car toute la chaîne est impactée.
Selon vous, quelle est la première conséquence à tirer de cet arrêt total d’activité ?
R. F. : Nous avons mesuré la fragilité de nos modèles économiques : des trésoreries chancelantes, des prix mal calculés, des difficultés à vendre des produits cosmétiques après le soin. Bref, une grande expertise technique, mais pas assez de rigueur au niveau de la gestion durable de l’entreprise. L’arrêt brutal nous met face à ces réalités.
De plus, cette crise est anxiogène car chacune a pu mesurer combien il est complexe, dans nos métiers du toucher, de réaliser des soins sans risque de contamination. Les gestes d’hygiène de sécurité que l’on n’affichait pas, vont devenir aujourd’hui le vecteur central de la communication omnicanale. Les cartes de soin doivent être repensées en fonction du temps nécessaire au nettoyage et cela durablement, je le crains. Sécurité et rentabilité sont les deux axes de réflexion. Certains protocoles doivent être modifiés en fonction de ce que nous vivons. Pas question de faire courir des risques inutiles aux salariés, aux apprentis et aux clients. Une vaste réflexion doit s’engager rapidement et des choix devront être faits.
Si vous aviez un mot d’encouragement, ce serait ?
R. F. : Nous allons réussir ensemble. Cette crise a soudé les lignes, et fait prendre conscience de l’importance de se parler et de chasser nos vieilles lunes. Soyez attentives, ne laissez rien passer. On vous regarde ! Vous n’avez pas le droit à l’erreur, mais vous n’êtes pas seules : toute la filière est mobilisée pour que nous réussissions ensemble ce formidable challenge. Cette crise est une chance pour notre profession. Elle va valoriser vos savoir-faire. Davantage de clientes vont retrouver le chemin de vos instituts pour passer avec vous un moment exceptionnel de détente et de plaisir. Vous avez tous les atouts en mains pour réussir. La CNEP, qui rassemble la filière, est à vos côtés pour relever ce défi.
